20/12/2018 : Arthur, le gniaqueur qui défie Uber.
Depuis son stage chez Gniac en 2014, Arthur Hay a fait du chemin. A bicyclette… Installé à Bordeaux après avoir quitté Paris et le réseau, il n’a pas trouvé le job de ses rêves auquel son master de gestion de projets humanitaires le destinait. Alors comme beaucoup de jeunes, à la fois actifs et sportifs, Arthur a commencé une activité de coursier, livreur de repas à vélo, chez Deliveroo. “Un job correct et plutôt bien payé: jusqu’à 18 euros brut de l’heure, primes et bonus compris”, explique-t-il.
Mais lorsqu'en 2016, Take Eat Easy, le principal concurrent fait faillite et qu'il est racheté par Deliveroo, la donne change: “ Les restaurateurs ont perdu de nombreux clients et beaucoup de coursiers se sont retrouvés sans ressources, les deux dernières semaines de courses ne pouvant être payées”, raconte Arthur. Une aubaine pour Deliveroo qui a profité de ce soudain excédent de main d’oeuvre pour baisser drastiquement les tarifs. “Les courses qui étaient rémunérées 7,5€ par heure auxquels il fallait ajouter 4€ par commande ainsi que des bonus pluies et week-end, sont subitement passées à 5€ par commande, primes et rémunérations horaires ayant été supprimées. Il fallait assurer jusqu’à 7 commandes par heure pour réaliser le même gain qu’auparavant. C’était vraiment mission impossible”, se rappelle Arthur.
Face à la dégradation des conditions de travail, Arthur participe à la création d’un collectif de coursiers. Il s'engage dans la foulée au sein de la CGT où il crée la section des coursiers à vélo de la Gironde avant d’en devenir le premier secrétaire. Afin de garantir un système de rémunération plus stable, il crée à l'été 2017 "Coursiers Bordelais", une société coopérative de livraison à vélo qui emploie aujourd'hui quatre équivalents temps plein.
La structure offre des contrats salariés mais flexibles, adaptés aux besoins des coursiers (souvent étudiants ou travaillant déjà pour d'autres plateformes). "Une voie pour sortir de la précarité avec un revenu sous forme de salaire et des cotisations aux assurances sociales", explique-t-il. "Coursiers Bordelais" a rejoint le réseau Coopcycle qui met à disposition des outils numériques et de gestion pour les coopératives de livraison.
Aujourd'hui, Arthur s’attaque à l’Europe avec la participation à un mouvement transnational européen à Bruxelles. “Le gouvernement semble être la proie des lobbys des grandes plateformes. Uber se vante d'avoir carrément écrit un amendement ayant pour but d'éviter la requalification des contrats des coursiers en salariés des plateforme, explique-t-il. Le gouvernement a cédé afin de préserver les chiffres du chômage, notamment dans les zones de banlieue ou à forte population étrangère, lieux de recrutement importants pour les plateformes, continue Arthur. On a beau avoir l’habitude de s’engager, faire du lobbying sans être professionnel, c’est vraiment difficile “, reconnaît-il avant de remonter sur son vélo.